La fée carabine / Daniel Pennac

Tome 2 Saga Malaussène...

2 sur 6 mais on ne s'en lasse pas... le livre se présente à nouveau comme une enquête policière, peut-être même (certainement d'ailleurs) plus fine et complexe que la première... et cette fois, Malaussène bien qu'au coeur de l'action est presque un personnage secondaire.

Encore une fois autant de personnages aussi cocaces et complexes qu'irréalistes... des vieux et des flics... des vieux qu'on tue... des vieux qui tuent des flics... des flics qui sont vieux... et Malaussène qui porte le chapeau, le fameux Bouc-émissaire.

Quel foutu caractère ce Benjamain Malaussène, même face au pire, il reste droit et charitable, amoureux et inquiet, mais il reste avant tout le grand frère de sa tribu... la tribu des originaux Malaussène... avec un courage et une ironie déconcertante.

C'est drôle, c'est complexe, c'est dingue... mais c'est surtout une formidable manière d'aborder des sujets graves "comme si de rien n'était"...

Pennac fait discrètement de la politique... dans ce formidable roman on parle de racisme (un peu à la Coluche, de cette génération où l'on pouvait parler d'Arabes avec tellement d'ironie, sans craindre un tribunal), on parle de capitalisme, de corruption... on aborde la douleur, le suicide, la solitude, le crime, la vieillesse, la guerre... mais pour un peu, on ne s'en apercevait pas ! ;))

Finalement c'est du Malaussène, c'est incisif mais ça ne donne pas de leçon... ça fait réfléchir ! ;)

Chapeau... vivement que je me colle au prochain numéro.

Un extrait qui donne ça :

"Moi, Benjamin Malaussène, je voudrais qu'on m'apprenne à dégueuler de l'humain, quelque chose d'aussi sûr que deux doigts au fond de la gorge, qu'on m'apprenne le mépris, ou la bonne grosse haine bestiale, celle qui massacre les yeux fermés, je voudrais que quelqu'un se pointe un jour, me désigne quelqu'un d'autre et me dise : celui-là est le salaud intégral, chie-lui sur la tête, Benjamin, fais-lui bouffer ta merde, tue-le et massacre ses semblables. Et je voudrais pouvoir le faire, sans blague. Je voudrais être de ceux qui réclament le rétablissement de la peine de mort, et que l'exécution soit publique, et que le condamné soit guillotiné d'abord, puis qu'on le soigne, qu'on le cicatrise, et qu'on remette ça une fois guéri, nouveau guillotinage, toujours par l'autre bout, les tibias, cette fois, et de nouveau soigné, et de nouveau cicatrisé et clac ! les genoux, au niveau de la rotule, là où ça fait le plus mal ; je voudrais appartenir à la vraie famille innombrable et bien soudée, de tous ceux qui souhaitent le châtiment [...] Je voudrais appartenir à la grande, belle Âme humaine, celle qui croit dur comme fer à l'exemplarité de la peine, celle qui sait où sont les bons, où sont les méchants, je voudrais être l'heureux proprio d'une conviction intime, putain que j'aimerais ça ! Bon Dieu, comme ça simplifierait ma vie !"

(Editions Folio - 8,20 €uros)